jeudi 8 novembre 2007

Episode 13 : Blackmail Blacker

Seuls ceux qui connaissaient Blacker étant en mesure de comprendre toute l'étendue de ces quelques mots dans sa bouche.
Lorsqu'il disait que c'était à lui de jouer, ce n'était pas au sujet de n'importe quel jeu, c'était au sujet de son jeu et il était le seul à en connaître les règles.
De toute manière la seule chose que vous aviez besoin de savoir, c'est que quelles qu'elles soient, vous étiez toujours perdant contre lui.

Imaginez un peu, c'est comme si vous vous retrouviez devant la banque, qu'elle choisissait votre mise, qu'elle poussait même le vice jusqu'à vous laissez choisir vos propres cartes mais que de toutes manières les siennes seraient toujours plus fortes ...

En matière de bluff, Blacker était un as, et n'importe qui en face de lui ne valait guère mieux qu'un deux ou un trois.
Même moi, je ne m'estimais tout au plus un valet en comparaison.
C'est pour cela que lorsqu'il tenait son carnet ouvert à la mais, je l’écoutais sans brocher et laissait faire le maître.

" Dans l'hypothèse où ce cher monsieur Bergère renseignerait la Brigade Economique ou les magistrats du tribunal des affaires fiscales, avec ou sans l'intermédiaire de la dénommée Vera, je pense pouvoir te donner quelques pistes, Ronan. "

C'était marrant de voir comment il ponctuait toujours les phrases par le nom de son interlocuteur. Ce n'était pas tant cette pratique qui vous faisait sourire, mais le ton qu'il employait qui vous obligeait à le faire alors que vous vous sentiez mal à l'aise.

" Néanmoins " reprit il. " Si c'est lui qui se cache d'eux, ça risque d'être un peu plus compliqué "

Mais pas impossible, pensais-je, peut-être un peu trop fort vu le regard qu'il me décocha.

" Fait comme tu peux " lui répondis-je, et alors il se leva et décrocha le combiné du téléphone qui était au mur.
Je dois avouer que je n'arrivais pas à saisir la teneur de la conversation, mais j'arrivais quand même à attraper quelques bribes au vol qui me permettaient de reconstituer des semblants de phrase du genre : " je connais ton secret ... " ou bien " si tu veux pas que ton supérieur l'apprenne ... " enfin le genre de phrase qui ne vous donne pas envie d'en savoir plus sous peine d'être à votre tour l'objet de l'attention de Blacker.

En à peine vingt minutes il était de retour avec deux courtes listes qu'il me tendit.
La première comportait trois adresses qui, selon Blacker, étaient actuellement utilisées par le ministère de la justice pour planquer des témoins.
La deuxième, beaucoup plus longue, en comportaient sept. C'étaient les lieux appartenant aux sociétés écrans de Bergère et n'étant officiellement pas utilisés.
A elles deux, ces listes pouvaient nous conduire en taule ou à la morgue, voir sûrement même les deux.

Dix adresses ça faisait beaucoup pour moi tout seul, et je ne voulais pas entraîner les autres zouaves dans un trip aussi dangereux. il fallait que j'affine la sélection.
Les planques devaient à la fois correspondre aux impératifs de sécurité de celui qui planque mais à la fois correspondre aux attentes du planqué.
Je rayais les entrepôts ou autres usines louches du genre de la seconde liste, trop difficile à sécurisé et trop grand pour un homme seul ou accompagné.
Une des planques de la flicaille se trouvait près de l'aéroport, je voyais mal Bergère quitter la ville sans essayer d'emporter avec lui quelques uns de ses biens mal acquis.

Au final j'arrivais à resserrer sur quatre lieux, deux de chaque listes, j'aurais aimé faire mieux, mais je ne pouvais pas trop faire le difficile vue que j'étais encore eu point mort il y a à peine une heure de cela.
Faut dire aussi que la suite ne me réjouissait pas trop, les probabilités de tomber sur la bonne planque étaient minces, et les conséquences de chaque erreur risquaient d'être fâcheuse.
Et c'est pour cela que j'allais avoir besoin de Mulot, et franchement en arriver à cette extrémité, il y avait de quoi déprimer.

Je me levais et remettais mon galurin sur la cafetière tout en saluant l'assemblée d'un : " Merci les gars, je vous en doit une. "
Qui dans un soupir fut suivi d'un : " Ramène toi Mulot, je vais avoir besoin de tes dons. "

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