jeudi 28 février 2008

Episode 27 : Dans le port d'Old Swamp City, y a un privé qui coule ...

Ce n'est vraiment que lorsque l'on se retrouve projeté dans le coffre d'une berline, que l'on est en mesure d'apprécier le goût des mafiosi pour les grosses voitures.
Il faut dire qu'ils ont souvent le sens pratique quand il s'agit de se débarrasser des cadavres.
Et en l'occurrence, on aurait bien pu en caser deux là où je me trouvais. Bien que l'idée de me situer à la place du mort aurait pu prêter à sourire, je n'étais pas vraiment d'humeur à rigoler.
Ce n'est pas tant le fait que l'on me conduisait au port pour une dernière trempette qui me chagrinait, mais plutôt ce qui avait bien pu m'échapper sur cette satané liste qui allait me conduire six pieds sous quai.

Je n'avais jamais vraiment pensé au jour où j'allais passer l'arme à gauche. Je ne me faisais pas d'illusions sur ce point, il y avait peu de chance que je finisse de manière glorieuse en sauvant la veuve et l'orphelin.
Les plus médisants avaient prédit que l'on retrouverait mon cadavre un beau matin dans le caniveau mort des suites d'un coma éthylique après une soirée arrosée plus que raison.
Et je dois dire qu'il y a encore quelques temps, je ne leur aurais pas franchement donné tort.
En tout cas c'était un sort beaucoup plus enviable que celui qui m'attendait au bout de ma ballade en voiture.

Le port d'Old Swamp, n'avait de port que le nom, on ne pratiquait plus la pêche depuis un baille, à croire que même les poissons refusaient de s'approcher de nos cotes.
Et mieux ne fallait pas risquer de balancer une ligne du haut de la jetée, car c'était un coup à finir au fond avec elle.
La plaisance aussi n'avait pas lieu d'être, probablement parce qu'il n'y avait rien de plaisant à rester amarré ici, surtout depuis que tous les truands du coin avaient décidé de faire main basse sur les alentours.

Toujours ce coté pratique, ils font venir leur cargaison, la stock dans les entrepôts des quais, ils font leur petites affaires, et souvent règlent leur compte. C'est sûrement pour cela qu'il y avait plus de cadavres dans les eaux du port que dans la morgue municipale.
C'est probablement ce qu'ils appellent en économie la centralisation des segments.
En tout cas les flics laissaient faire, bien trop heureux de ne pas voir ces criminels s'éparpiller dans toute la région. Et surtout de ne pas avoir à leur courir après.
Pas de témoins, pas de crimes, pas de cadavres ... ça leurs évitaient beaucoup de paperasse !

C'est surtout quand le moteur s'est coupé que j'ai commencé à déchanter. Je savais bien ce qui m'attendait après.
Le coffre s'est ouvert, la lumière m'aveuglant alors quelques instants qui me parurent bien trop court lorsque je vis la tronche des hommes de main de Valentin.
Ils étaient trois rien que pour moi, j'étais presque flatté que l'on me considère assez dangereux pour qu'il soit nécessaire de me faire escorter par autant de monde.
Surtout qu'un seul coup d'oeil suffisait à voir que la moitié d'un aurait été largement en mesure de me maîtriser.
Peut être que Sal n'avait pas le compas dans l'oeil, ou alors était il prudent, le plus probable étant qu'il ne fasse pas assez confiance à ses sbires même pour un boulot aussi simple.
La suite se déroula assez rapidement, l'un d'eux alla chercher des chaînes et de quoi me lester au fond, pendant que les deux autres me tenaient fermement.
En quelques minutes j'étais vêtu d'une belle camisole métallique et de pendentifs en parpaing.

Et ce qui devait arriver arriva, symboliser par un grand plouf, le genre de bruit qui te faire dire lorsque tu coule un bronze que celui là tu ne le reverra pas de sitôt.
ça résumait assez bien la situation, je n'étais qu'un bronze tomber dans la cuvette de ma vie, et Sal Valentin et ses hommes venaient de tirer la chasse.

Alors que je m'enfonçais dans les eaux troubles du port, laissant derrière moi traîner mes dernières bulles d'oxygène vers la surface, j'aperçus vaguement des ombres se tordre derrière le voile aqueux.
Et alors que je sombrais peu à peu dans l'obscurité, j'entendis faiblement des cris et trois sons secs qui vinrent me bercer dans mes derniers instants.

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